Lettre ouverte au Maire de Vannes
« À Vannes, la démocratie locale en état d’urgence »
Vannes, le 27 mars 2023
Monsieur le Maire,
Depuis plusieurs semaines, les dossiers vannetais mettant en lumière votre pratique solitaire du pouvoir ne cessent de s’accumuler. Politique commerciale, politique culturelle, politique éducative… : tout est matière à illustrer la logique de l’opacité et du fait du prince qui est la marque de votre gouvernance.
Désormais membre actif du parti Horizons, vous revendiquez votre proximité politique avec le président de la République. Lors du conseil municipal du 6 février dernier, vous avez même publiquement assumé votre soutien sans réserve à la réforme des retraites du Gouvernement Borne qui, au-delà de ses profondes injustices, illustre la brutalisation institutionnelle profondément inquiétante d’un pouvoir exécutif qui refuse d’écouter la société, les citoyen·ne·s et leurs représentants – ces fameux corps intermédiaires tant méprisés depuis 2017 –, qu’il s’agisse des syndicats, des partis politiques ou encore des élus.
Si nous ne pouvons pas directement agir pour obtenir le retrait du texte gouvernemental, nous entendons bien faire le nécessaire pour que la démocratie locale soit pleinement respectée et, à travers elle, l’ensemble des citoyens et acteurs vannetais. Dans la période extrêmement troublée et porteuse de nombreuses angoisses pour l’avenir, la première responsabilité des élus locaux est bien de créer les conditions locales de la confiance, du respect mutuel et du dialogue. Il y a urgence à Vannes !
Dans le domaine éducatif, nous avions déjà dénoncé, en février 2018 concernant la fusion des écoles Jean Moulin et Joliot-Curie, votre passage en force dans un calendrier beaucoup trop contraint qui allait à l’encontre des préconisations de l’Éducation nationale. Vous n’en avez hélas pas tiré les enseignements. Nous demandons par conséquent que la multiplication des annonces précipitées relatives aux fusions d’écoles laisse la place à une concertation apaisée avec l’ensemble de la communauté éducative, incluant étroitement les parents d’élèves et leurs représentants et associant les élus municipaux dans leur diversité politique. Cette demande est d’autant plus justifiée que, dans le cas de la fusion Calmette-Madeleine, l’enjeu de la relocalisation de l’accueil de loisirs de Kerniol était nécessairement connu de vos services et de vous-même depuis plusieurs années et permettait donc d’anticiper facilement et de co-construire des alternatives bien en amont ! Au-delà, nous renouvelons notre demande de disposer d’un état des lieux partagé, de perspectives objectivées et d’organiser, avant la trêve estivale, des assises de l’éducation pour mettre tous ces sujets sur la table en transparence.
Dans le domaine commercial, nous pouvions légitimement espérer que vous auriez tiré les leçons des multiples polémiques des dernières années provoquées notamment par votre opacité et votre refus de contrôler plus étroitement des structures dont la création et le fonctionnement dépendent pourtant largement de la municipalité. De surcroît, nous apprenons par la bande que vous entendez changer la raison d’être du café du Kiosque, dont la vocation initiale était de soutenir les associations de commerçants et leurs contributions à l’animation de nos quartiers, tout cela sans aucune forme de concertation préalable ! Au passage, la fermeture de cet établissement pendant plusieurs mois illustre là aussi les carences en matière de gestion municipale alors que la date de fin de bail était connue depuis 2017 ! S’agissant des politiques tarifaires (halles, terrasses), votre méthode et celle de votre équipe ne sont ni compréhensibles ni acceptables. Nous avons découvert a posteriori que vous n’avez ainsi organisé aucune réunion avec les commerçants préalablement au conseil municipal de décembre
2022 où les nouveaux tarifs étaient mis au vote ! Le sujet tarifaire a même été mis à l’ordre de la commission halles et marchés un mois après ce conseil ! Et quand certains élus de votre groupe essaient de faire croire aux commerçants que la hausse des loyers doit s’élever à 6,6%, en vertu du vote intervenu en conseil, il convient de rappeler ici qu’il s’agit en réalité d’un plafond maximal et que vous avez toute latitude pour arrêter l’évolution des tarifs entre 0% et +6,6%. Concernant les nouveaux tarifs des terrasses, là aussi problème de méthode et de choix politiques dont la justification apparaît plus que contestable. Et ces sujets ne figurent même pas à l’ordre du jour des commissions organisées cette semaine ! Nous demandons en conséquence la réunion en urgence du comité consultatif commerce et attractivité et de l’ouvrir très largement.
Enfin, dans le domaine culturel, nous avons eu l’occasion, à plusieurs reprises, d’exprimer nos désaccords, sur le fond comme sur la forme, avec plusieurs de vos annonces concernant les équipements comme les événements qui participent au rayonnement de notre ville. Là aussi, acteurs de terrain mis devant le fait accompli, élus écartés ! Nous continuerons à faire entendre notre voix sur ces sujets cruciaux, d’autant plus que de nombreuses incertitudes demeurent sur les modalités de mise en oeuvre de ces décisions unilatérales et sur l’avenir de plusieurs bâtiments emblématiques (Cohue, Carmes, Trussac…). Nous avons par ailleurs découvert dans la presse l’importance des fouilles réalisées à proximité du château de l’Hermine : là encore, aucune information des élus à aucun moment ! Nous demandons par conséquent que ces découvertes, leurs éventuelles poursuites et leurs incidences patrimoniales fassent l’objet d’une large communication dans les meilleurs délais et conduisent à envisager une évolution de la conception architecturale du futur musée pour permettre de les valoriser dans les meilleures conditions.
À travers ces enjeux majeurs de la démocratie locale, c’est bien l’avenir de notre ville dont il est question et la capacité de notre collectivité à y associer l’ensemble des citoyens et des forces vives de notre territoire, une condition indispensable pour garantir des réussites collectives et renforcer les liens sociaux à un moment où la tentation du repli sur soi fragilise nos sociétés. Lors du dernier conseil municipal, à l’occasion d’un échange sur la méthode de gouvernement, votre premier adjoint avait déclaré « si nous n’avions pas l’intime conviction que ces choix étaient les bons, nous n’aurions pas pris ces décisions ». Nous redisons pour notre part que dans un pays démocratique l’intime conviction c’est bien, la délibération collective c’est mieux !
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Maire, nos plus sincères salutations.
Simon Uzenat, Laetitia Dumas, Christian Le Moigne, Sandrine Berthier et Franck Poirier
Conseiller·e·s municipaux·ales du groupe DVG et écologiste « Libérons les énergies vannetaises !